(390) we're only human after all (daisy)

Deux corps, nus ; quelques nuits, ensemble. C'était le contrat, ni plus ni moins. Ils se croisaient dans ce bar où ils avaient leurs habitudes, se séduisaient comme au premier jour, rentraient soit chez l'un soit chez l'autre, passaient quelques minutes au septième ciel puis se disaient au revoir, comme s'ils étaient des inconnus, comme s'ils ne venaient pas de partager un moment des plus intimes. Rien de plus, rien de moins. Pourtant, c'est au petit matin que Lyndon se réveilla, Daisy allongée à ses côtés. Toujours nue, et il se souvenait parfaitement de ce qui s'était passé la nuit dernière. Ils avaient fait comme d'habitude, à la différence près qu'ils s'étaient endormis dans les bras l'un de l'autre. Ça ne faisait pas partie du contrat, ils n'étaient pas censés dormir ensemble, c'était beaucoup trop intime pour être acceptable. Mais il ne pouvait pas fuir la scène du crime, ils étaient chez lui, il n'avait nulle part où aller. Puis elle dormait si paisiblement, il n'avait pas le coeur de la réveiller pour la virer de chez lui. Lyndon poussa un long soupir puis se redressa, passant ses mains sur son visage. Il tourna la tête pour observer Daisy, et il se pencha pour l'embrasser avant de se rendre compte de ce qu'il faisait. « Non mais qu'est-ce qui me prend ? » Lyndon secoua fermement la tête, comme si cela allait l'aider à reprendre ses esprits. Il ne s'attachait pas, il n'offrait pas des gestes doux comme celui-ci, ce n'était pas lui. Sentant son estomac crier famine, Lyndon se leva et alla directement dans la cuisine, sans prendre la peine d'enfiler plus de vêtements qu'un simple caleçon. Il prépara alors un petit-déjeuner à base d'oeufs, de bacon et de pancakes, la recette des champions. Puisque Daisy était là, autant qu'il en fasse pour elle aussi, libre à elle de manger quand elle se réveillerait, ou de prendre la fuite. Dans tous les cas, il avait faim et il n'allait pas se priver parce qu'elle était là.

Un léger courant d’air comme la caresse d’un amant invisible. La belle au corps dénudé, aussi nu que ses peintures de la renaissance, aussi délicat que ceux-là, s’éveille aux merveilles du monde ou juste à l’effroyable gueule de bois qui est là n’attend juste le moment pour lui pourrir la vie. Elle a encore trop bu Daisy, et surtout pire que tout quand ses yeux chocolatés s’ouvrent de nouveau au monde, elle se rend vite compte qu’elle n’est pas chez elle. D’un bond elle se redresse s’agrippant au drap, seul tissus qui la couvrait. Elle mit un peu de temps à réaliser ce qui avait dû se passer. « Un moment, je reprends juste mon souffle », comme une gifle en plein figure ses dernières paroles lui revinrent en mémoire. Reprendre son souffle avait donc pris un très très long moment à la jolie brune, qui épuisée avait couché et surtout dormi dans le lit de son amant de la nuit. Elle y reviendra Daisy avec ses envies de souffler, à s’allonger un instant et dormir avec un homme. Ce qui l’a surprise en y repensant même. Elle qui dormait très mal au côté de quelqu’un, même Safia, elle semblait bien avoir dormi avec… ou bien juste qu’il avait couché autre part. Mais oui voyons, pourquoi ils auraient dormi ensemble ? Ce n’était pas dans le marché ce genre de trucs. Enfin l’odeur du bacon crépitant dans une poêle vint chatouiller ses narines, la faisant saliver plus que de raison tandis que son ventre grognait famine. Elle grogna à son tour, en espérant que son hôte lui laisse un peu manger avant sa traverser de la ville pour aller à son appartement. Seulement, un nouveau défi se révéla à elle encore au saut du lit. La quête de ses vêtements. Pourquoi elle ne retrouvait rien dans ce foutoir ? Elle chipa un t-shirt blanc qui trainait sur le dossier d’une chaise et qui ne sentait pas trop fort le mâle pour être porter pour une demoiselle. Vêtue de se simple t-shirt, elle sortit de la pièce en ramassant ce qu’elle trouvait qui lui appartenait. Elle trouva bien rapidement la cuisine, qui ne lui était pas réellement familière et pris place sur un siège en attrapant une assiette où elle déposa deux pancakes encore chaud. « Salut, désolée j’arrive pas à remettre la main sur toutes mes affaires, je te rendrai le t-shirt quand ça sera… ah bah tiens, ça c’est à moi. » Elle se redresse, jolies fesses à l’air, et attrapa une partie de sa parure de sous-vêtements. Elle l’enfila rapidement et arracha une partie du premier pancake qu’elle engloutie. Le silence était de mise, la situation lui paraissait déjà bien étrange comme ça, qu’elle lui fasse les yeux doux pour un peu de miel ou de sirop d’érable sur ses pancakes. Elle mangeait tellement rapidement, comme pour s’empêcher d’avoir l’occasion de parler. Rien n’allait dans cette relation qui était pourtant très simple sur les fondations. Du sexe, seulement du sexe, une pizza parfois, mais rien comme ça qui pourrait juste portait à confusion.

Occupé à préparer le petit-déjeuner dans la cuisine, Lyndon fut alerté de la présence de Daisy qu'en entendant le parquet grincer. Il jeta un coup d'oeil derrière son épaule pour s'assurer que c'était bien elle (qui d'autre) puis se remit aux fourneaux sans s'embêter de politesse pour lui dire bonjour. Lyndon n'avait jamais fait dans la galanterie, ça n'allait pas changer. Il n'allait pas se transformer en homme tout mielleux parce qu'ils avaient dormi ensemble ; ce qui s'était passé hier était déjà trop. Une fois les pancakes prêts, il les empila dans une assiette et déposa l'assiette devant Daisy. Il la regarda en silence, ses yeux ne cachant pas leur désir alors qu'ils parcouraient son corps sans aucune gêne. Il la regarda faire, et c'est un léger sourire amusé qui déforma ses lèvres, profitant de la vue quand elle se pencha pour récupérer sa petite culotte. « Tu peux le garder, il te va mieux à toi qu'à moi. » Aucune fille ne portait ses vêtements, il ne leur en laissait pas l'occasion. C'était surprenant, nouveau, mais il aimait ça. Daisy qui portait son tee-shirt, il ne l'avait probablement jamais trouvée aussi sexy. « Même si j'ai juste envie de te l'enlever, » précisa-t-il avec un sourire en coin quand son regard croisa celui de la jeune femme. Il prit une tranche de bacon qu'il dévora dans le silence, et sentit rapidement la gêne s'installer entre eux. C'était une situation inédite. Ils avaient déjà commandé des pizzas après leurs parties de jambes en l'air, mais ils n'avaient jamais passé la nuit ensemble. Il avait l'impression que quelque chose avait changé entre eux, qu'ils étaient passés à l'étape supérieure, et ça ne lui plaisait pas. « Écoute, Daisy, ce qui s'est passé cette nuit... n'en faisons pas une habitude, ok ? » Il préférait mettre les choses à plat et la prévenir tout de suite, avant qu'elle ne se fasse des films. C'était une fille, et il ne leur en fallait pas beaucoup pour s'imaginer le mariage et les enfants.

Le mot était faible quand elle se disait mal à l’aise, bordel que c’était plus ardent que ça. Surtout quand elle sentait le regard perçant et brûlant de Lyndon sur sa peau. Bien sûr qu’elle aimait ce regard, bien sûr qu’elle était dingue face à ce regard, comme toutes filles qui le croisait. Mais bien sûr qu’elle était Diasy, et qu’elle ne laissait rien paraître. Et bordel ce que c’était atrocement dur et bizarre. « Tu sais que ça devient très bizarre là ? » Et encore là c’était par ces mots qu’une pâle copie de la réalité. Elle sentait la brûlure de son regard, chauffant ses cuisses, son entre jambe. Par dieu non ! Elle croisa ses jambes, pas d’humeur à aller crapahuter dans un lit avec acrobaties et compagnie le ventre vide. « Va juste falloir te contenter de la vue. Car c’est tout ce que t’auras aujourd’hui. Enfin avant que j’ai assez mangé. » Elle engloutie son second pancake et attrape trois tranches de bacon. Si croustillantes, si bien cuites comme elle aimait son bacon. Non il n(était pas si mauvais cuisiner ce Lyndon pour un petit déj improvisé. Elle dévorait la morfale, elle essayait de ne plus le remarquer cet animal en rute, elle essayait de ne pas penser qu’elle l’était aussi en rute, en manque, dévorée par cette envie commune de deux animales en voie d’extinction. Puis comme un gros con, car il restait un mec, un mec avec une fichu fierté de son cul, il l’avait considéré comme toutes les autres. Grossière erreur, car Daisy ne serait jamais comme les autres. « Tu te fous de ma gueule là, Lyndon ? Tu te fous juste de ma gueule, car je vais t’enfoncer une de ses tranches de bacon au fond du gosier si c’est pas le cas. Tu crois vraiment que j’ai envie de retenter l’aventure ? Te fous pas de moi, okay ?! Je suis autant mal à l’aise que toi à l’heure qu’il est. » Elle balançait la tranche de bacon qu’elle allait manger et sauta sur ses pieds avec ce regard qui faisait froid dans le dos à l’homme le plus courageux de cette pitoyable terre. Elle avait envie de jurer, de lui dire que c’était juste un connard, mais on était le matin, et Daisy s’efforçait toujours à ne pas jurer le matin, même si dieu seul savait à quel point que ça lui aurait fait du bien ! « Et puis tu sais quoi ? Je vais juste m’en aller, car sérieux je sais pas ce qui nous a pris, j’étais juste surement trop fatiguée hier… Faut dire que t’y es pas allé de main morte… Mais quoi qu’il en soit. Non ça ne se reproduira pas, je vais m’en assurer. » Elle arpentait les pièces, le chemin même qu’ils avaient emprunté la veille avec fougue et passion dévorante. Elle attrapait à la volet ses affaires, elle lui balançait à la tronche le t shirt se retrouvant poitrine nue, mais elle la recouvrit de sa blouse légère corail. Elle enfila son jean dans une tremblante fureur, attrapa son sac et se dirigea vers la porte avant de se retourner dans une envolée de boucles brunes. « Oh et si t’as pas encore compris que je suis pas ce genre de fille à rêver de prince et d’enfants, et pour que tu viennes à vouloir te rassurer, peut être que ça vient de toi le problème ! Tu n’auras qu’à balancer mes affaires que j’ai oublié. Bon retour à ta salope de vie. Là où toutes les filles veulent juste que tu sois leur prince. Car moi je cherche pas de prince ! » Elle ouvrit la porte et s’apprêtait à sortir.

Lyndon leva les yeux au ciel, amusé par la réaction de Daisy. Il la connaissait par coeur et savait qu'elle en avait autant envie que lui. C'était comme ça entre eux, ils n'étaient jamais rassasiés, ils en voulaient toujours plus. Elle avait beau prétendre le contraire, il ne la croyait pas, elle ne serait jamais crédible dans ce rôle. Ils n'attendaient peut-être rien de plus l'un de l'autre, mais le sexe, ça, ils en redemandaient toujours. Alors puisqu'elle ne voulait pas s'amuser dès le matin, il allait suivre son exemple et décida de lui parler d'hier soir. Dormir ensemble n'était pas prévu et il était hors de question que ça recommence, il ne voulait pas que ça devienne une habitude entre eux. Mais Daisy n'eut pas la réaction qu'il attendait. « Putain, mais— » À deux doigts de la traiter de folle à lier, Lyndon lâcha ce qu'il avait dans les mains et partit à sa poursuite, refermant violemment la porte avant qu'elle ne passe le pas, la tenant alors prisonnière dans son appartement. « T'es sérieuse, là ? » C'était quoi, son problème ? Pourquoi est-ce qu'elle réagissait comme ça ? Elle était censée s'en foutre, comme lui, alors ils n'avaient aucune raison de se disputer. Ils étaient censés se mettre d'accord sur le fait que ça avait été une erreur et se promettre de ne plus jamais recommencer. Décidément, les choses ne se passaient jamais comme prévu avec Daisy. « J'ai pas envie d'être un prince, pour personne, » répondit-il, cette fois plus sérieux, les sourcils froncés. Il n'avait jamais prétendu être un prince, il n'en était pas un et ne voulait pas qu'une fille pense qu'il pouvait en être un, que ce soit Daisy ou une pauvre inconnue à qui il ne demanderait jamais le prénom pendant les quelques heures passées ensemble. « Alors quoi ? Tu te casses, et après on fait quoi ? On arrête tout ? » Je vais m'en assurer, qu'elle lui avait dit. Comment allait-elle s'en assurer ? En disparaissant de sa vie ? Mais alors qu'il lui posait la question, il se rendait compte qu'il n'en avait pas envie. Il n'avait pas envie que ça s'arrête, il n'avait pas envie de lui dire au revoir. Qu'est-ce qu'il lui prenait ? C'était juste un plan cul comme un autre, si elle ne voulait plus de lui il en trouverait une autre. Alors pourquoi est-ce que ça l'emmerdait autant ? « On sait tous les deux que tu tiendrais pas deux jours sans moi. » C'était dangereux, très dangereux, de mettre Daisy au défi, il en était conscient. Lyndon se glissa dans l'espace entre elle et la porte, pour l'empêcher de sortir. Les bras croisés contre son torse, il l'observait, attendait une réaction de sa part maintenant que la fuite n'était plus une option.