il fait nuit très nuit, il fait noir très noir, et la lune est belle ce soir.
tout est caché par cette pénombre assassine, et les étoiles ont peine à se graver au travers des ciels. les avions clignotent et brisent l'immensité de leurs lumières rouges, bleues, aveuglantes parfois, comme des comètes menteuses. il y a la lune, les nébuleuses, les astres, les constellations et puis il y a nolan, la plus belle de toutes les étoiles. en plus nolan, elle a des yeux (des yeux vraiment très bleus), ce qui la démarque vraiment de ces milliards de lumières éphémères. c'est leur problème vous savez, c'est leur point faible. les étoiles ne sauront jamais à quel point elles sont aimées et admirées, les étoiles seront toujours des ignorantes tristes, car elles sont aveugles de ces regards perdus au travers de leur pâleur. c'est pour ça qu'elles meurent, les étoiles, car d'abord, elles ont vécu sans avoir su.
nolan je crois, elle sait qu'elle est aimée, aimée vraiment très fort. je lui ai dit, parfois, même si c'est difficile, même si ça fait pleurer de prononcer ces mots et puis de les entendre, même si ça fait une étincelle soudaine et tranchante au cœur, même si certains battements finissent même par se perdre et par nous laisser une impression terrible dans la cage thoracique.
je lui ai dit parfois, parce que c'est important, parce que si elle part un jour, elle partira en ayant su, et ça fera un peu moins mal.
en tout cas, lorsqu'elle court près de la rivière, lorsqu'elle semble toucher la lune du bout de ses dix doigts, lorsque l'ombre de son corps se perd au travers de l'eau, du ciel et de la lumière, elle donne l'impression de tout savoir, de tout avoir. elle donne l'impression d'être reine, de posséder le sol qu'elle foule de ses pieds, d'avoir inventé les mots qu'elle prononce parfois. et je me dis que le rire n'a été créé rien que pour elle, juste pour la rendre encore plus belle.
pourtant, des fois nolan, on dirait qu'elle a oublié, tout oublié. on dirait que les portes se sont fermées devant ses yeux, et que les mots, elle les a tous désapris un par un, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un : vide. comme le vide qui emplit ses prunelles parfois, comme le rien qui se faufile entre les plis de son visage dans ces moments-là. et c'est souvent là que je dis que je l'aime, même si ça paraît très injuste que les plus beaux mots du monde soient prononcés pour mettre à terre la tristesse. car la tristesse ne mérite pas de les entendre, mais nolan si, alors ça ne compte pas.
alors que nos cœurs battent à l'unisson, alors que nos bras se balancent au même rythme, alors que nos jambes s'élancent et que leurs ombres s'enlacent, moi je pose la question, d'une toute petite voix comme si elle allait faire s'écrouler la reine (et puis le roi, les cavaliers, tout l'échiquier).
- t'es heureuse, nolan ?
je dis ça en soufflant un peu, parce que ça me fait mal à la gorge de courir aussi vite, de combattre le vent pendant vraiment longtemps.
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